âkâm'askîhk ᐋᑳᒼ'ᐊᐢᑮ (À travers le territoire)
Ces œuvres cinématographiques forment une série de méditations qui communiquent diverses conceptions artistiques du territoire. Les images terrestres des artistes contribuent à créer des réactions émotionnelles aux récits, qui sont tour à tour humoristiques et tragiques, en plus d’inspirer de profondes réflexions à propos de leur monde visuel. Les cinq vidéos tirées de la base de données en ligne de VUCAVU affichent une diversité de cultures et de croyances chez les artistes locaux et internationaux. Le tout en contrastant les autochtones et les non-autochtones, les artistes et les réalisateurs, afin d’intentionnellement élargir la compréhension des façons dont différents peuples voient et respectent le territoire. Par le passé, parmi les idées fausses à propos de notre culture aborigène, il existait une notion romantique de « l’Indien qui vit harmonieusement avec la nature ». Mon travail de conservation cherche à démontrer, à travers une diversité de voix artistiques issues de nombreux milieux, comment chaque artiste évoque la façon dont il ou elle désire appartenir et se connecter à son environnement naturel. Les artistes sont âkâm'askîhk (À travers le territoire) (1).
SWEAT (2016) est un court métrage d’un peu plus de quatre minutes, une œuvre tendrement touchante qui décrit la première expérience de l’artiste/réalisatrice Kristin Snowbird durant une cérémonie indigène de sudation. L’événement sacré auquel elle a participé n’a pas été filmé, car il s’est déroulé alors qu’elle était beaucoup plus jeune et qu’il est incroyablement personnel, et non destiné à devenir un spectacle public. De fait, l'œuvre à Snowbird évoque plutôt la cérémonie à travers des vues atmosphériques de la forêt ainsi que des images abstraites et des sons qu’elle a entendus et ressentis alors qu’elle était dans la hutte à sudation petite et bondée. Elle a aussi filmé une vieille hutte sur le terrain d’un ami, où aucune cérémonie ne s’est déroulée depuis plusieurs années. Néanmoins, la forêt qui l’entoure possède toujours une superbe, tranquille, mais tangible puissance qui peut être ressentie lorsqu’on est debout près des petites branches entremêlées de l’abri.
Le film commence en montrant l’artiste immobile dans les bois, en automne, au crépuscule. Ses épais cheveux noirs et rouges forment une tresse française diagonale sur sa tête. Elle inclut intentionnellement l’image de ses cheveux tressés à cause de leurs connotations, particulièrement par rapport à la tresse de sweetgrass (foin d’odeur), une métaphore de l’endroit où elle se trouve et de son identité ojibwée/crie. Le sweetgrass pousse naturellement partout sur les prairies et, surtout, il s’agit d’un remède que les cultures indigènes utilisent pour la purification spirituelle sacrée. En général, la tresse représente la force personnelle, la sagesse et l’identité aborigène. La croyance veut qu’avec chaque ajout de cheveux (ou de sweetgrass), la tresse devienne une entité plus forte, un lien plus fort.
L’artiste raconte lentement son expérience alors qu’elle se prépare mentalement à la cérémonie de sudation. Le mouvement rapide et intense des bouleaux évoque son anxiété tandis qu’elle voyage à travers le paysage. De sombres scènes de feu font allusion à la cérémonie, tout comme la danse de l’artiste avec ses rubans rouges, blancs et bleus, le tout étant suivi du soudain battement d’une aile. L’aîné à qui Snowbird a parlé à la fin de la cérémonie interprète cela comme un esprit d’aigle ayant visité l’artiste durant l’événement sacré. Cette expérience demeure un souvenir vif et saisissant que Snowbird continue de se remémorer à ce jour.
(1) « Dès la première fois où j’ai entendu parler de ce projet, je me suis interrogé sur ce que parler au territoire pourrait vouloir dire, particulièrement à cause de l’évocation potentielle d’une certaine vision romantique familière à propos de la connexion mystique des indigènes avec le territoire et la nature. Bien que cette supposée connexion soit présentée “positivement” au sein de la tradition romantique, j’ai réalisé depuis longtemps que la présomption d’une connexion directe (et donc culturelle) avec la nature était une menace à l’autonomie indigène, et non une bénédiction. » – Traduction libre : Richard Hill, Speaking into Ayum‑ee‑aawach Oomama‑mowan: Speaking to Their Mother, Walter Phillips Gallery/Banff Centre Press, 2016, pg 24.
Le "sweetgrass" pousse naturellement partout sur les prairies et, surtout, il s’agit d’un remède que les cultures indigènes utilisent pour la purification spirituelle sacrée. En général, la tresse représente la force personnelle, la sagesse et l’identité aborigène. La croyance veut qu’avec chaque ajout de cheveux (ou de sweetgrass), la tresse devienne une entité plus forte, un lien plus fort.