Ce programme réunit huit court-métrages qui, de façon percutante, ludique ou sensible abordent la question du langage ou des identités, en particulier les identités francophones vivant en situation linguistique minoritaire. Ces vidéos sont un échantillon limité mais qui, néanmoins, témoigne d’une histoire hybride insaisissable et nous donnent un aperçu des possibles troisièmes langues qui peuvent exister. La troisième langue / The Third Tongue est un projet né au Labo, centre d'arts médiatiques francophone de Toronto qui soutient et diffuse depuis 2006 le travail des artistes francophones de l'Ontario et d'ailleurs.



 

VUCAVU et Labo présentes:

La troisième langue: 

Tournée virtuelle 2022

Commissaire : Carolina Reis

 


La troisième langue

Commissaire : Carolina Reis


La troisième langue est une langue qui surgit de la coexistence de deux langues. Cette langue ne peut qu’être parlée et comprise par les individus vivant en contexte bilingue et connaissant, du moins partiellement, ces deux langues. Qu’elle soit issue d’un système binaire, ou subissant l’influence de multiples expressions et identités, la troisième langue est définitivement hybride. Elle s’affranchit à l’extérieur des frontières imposées par les institutions qui dictent et imposent la façon de parler et d’utiliser la langue officielle, par exemple, le prétendument bon, ou le mauvais, français (ou anglais). Ce projet découle d'une recherche sur la production artistique francophone avec une attention particulière sur les artistes francophones vivant en situation linguistique minoritaire et vise à mettre en lumière la question de l’identité et de l’art francophone.

L’art est aussi un langage indépendant. De ce fait, les œuvres présentées dans La troisième langue nous exposent également à un autre langage : celui des images, du mouvement et du son. Ensemble, ils forment un vocabulaire supplémentaire. Les artistes s’approprient des technologies, inventent leurs propres techniques en combinant différents médias pour raconter des récits autres, parfois contradictoires, parfois analogues à leurs expériences. Plutôt que de soutenir une construction identitaire, les artistes participant·e·s se moquent des stéréotypes, des dualités, rejettent les canons artistiques, s’approprient la matière médiatique et nous proposent d’entrer dans un espace extérieur aux géographies existantes. 

 

Elle s’affranchit à l’extérieur des frontières imposées par les institutions qui dictent et imposent la façon de parler et d’utiliser la langue officielle


Lors de sa première présentation publique au Labo en 2018, La troisième langue a offert aux publics trois types d’expériences : une projection, une installation et une table ronde. La présente diffusion virtuelle comporte une causerie, un programme de courts métrages et un mini-documentaire autour de la question de la troisième langue tous accessibles en ligne pendant la période de diffusion.

Pour la causerie virtuelle, le Labo a invité Marie Dauverné et Denis Bradette qui avaient présenté leur travail dans notre galerie à l'automne 2018. Les deux artistes ont des origines et des vécus très différents, mais leurs approches esthétiques et la nature de leur travail semblent liées d’une même parenté. Dauverné est une artiste qui crée des micro-récits vidéographiques dont les sujets personnels et l’esthétique DIY trouvent une résonance universelle. Denis Bradette est un artiste multidisciplinaire originaire du Nord-est ontarien avec une approche narrative riche et engagée, dont la plastique et l’humour des œuvres rejoignent le langage de Dauverné. 

« Hache de guerre, troisième sexe, l’histoire rend possible, crache ses cadavres exquis, c’est la langueur de l’huile, le noir du diamant, le fil des armes; je tire. »

- Texte récité (slam), extrait de “Les crevasses foisonnent de miniatures hérétiques”, Marie Dauverné, 2015-2018, V-tape

 

Les deux artistes ont des origines et des vécus très différents, mais leurs approches esthétiques et la nature de leur travail semblent liées d’une même parenté
Une image d'un enfant entouré de jaune et de vert.

Image fixe de: Des poussières de toi  | Jean-Marc Larivière | 4:00 | 2012, distribution par l'artiste
 

La projection réunit huit courts-métrages produits par sept artistes médiatiques francophones et un artiste anglophone qui aborde également la question de la langue, mais cette fois de la perspective de la langue dominante. Les réalisateurs·trices participant·e·s sont Marie Dauverné, Nadine Valcin, Maria Legault, Jacquelyn Hébert Daniel Cockburn, Lise Beaudry, Jean-Marc Larivière et Louise Bourque. Une caractéristique qui réunit plusieurs de ces œuvres est leur approche au médium. Tous les films, à leur façon, nous révèlent la matérialité et la texture de la pellicule ou des pixels à travers le collage, les photos, les résolutions d’écrans, l’utilisation d’images d’archives usées par le temps et des prises de caméra de surveillance. On perçoit l’amour du médium chez ces artistes. Cette esthétique très présente dans les courts-métrages nous donnent l’impression d’une matérialité physique, tangible et périssable d’un médium qui est souvent perçu comme immatériel et immuable. La détérioration de la pellicule, la corruption des fichiers numériques ou l’incompatibilité des formats est une réalité intrinsèque aux arts médiatiques et cet aspect devient très palpable dans les films sélectionnés.

...les courts-métrages nous donnent l’impression d’une matérialité physique, tangible et périssable d’un médium qui est souvent perçu comme immatériel et immuable.

De même, les histoires racontées dans cette projection montrent, chacune à leur façon singulière, une recherche sur l’identité qui à son tour n’a pas de substance saisissable. L’identité est un concept toujours fluide et en constante mutation, évoluant au cours des interactions et expériences de chaque individu naviguant à travers diverses communautés tout au long de leur vie. La diversité des approches témoigne d’une identité mouvante et aussi insaisissable que la matière qui fait le film. Qu’elle soit en français, en anglais ou non-narratives, chaque œuvre montre un point de vue unique qui échappe à toute catégorisation absolue. Loin d’être une compilation complète du paysage des arts médiatiques franco-canadiens, ces courts-métrages présentent une variété d’approches esthétiques et de points de vue qui, ensemble, donnent un aperçu condensé, et partiel des œuvres existantes et des possibilités pour la relève artistique.

Les films présentés dans ce projet exposent la multiplicité des facettes de l’art médiatique et donnent matière à se créer une histoire autre, que ce soit la troisième, la quatrième, ou plus encore. Entre fiction et réalité, ces récits hybrides invitent à imaginer d’autres identités, d’autres moyens de communiquer, d’autres espaces, et à porter un troisième regard sur le monde.


- Essai rédigé par Carolina Reis


 
La diversité des approches témoigne d’une identité mouvante et aussi insaisissable que la matière qui fait le film.

À PROPOS DES ARTISTES 


LOUISE BOURQUE

Après un exil de 30 ans aux États-Unis et ailleurs, la cinéaste Louise Bourque est récemment revenue s’établir dans son Edmonton natal, au Nouveau-Brunswick. Ses films ont été projetés dans une cinquantaine de pays et diffusés sur les ondes de PBS et de Sundance Channel aux États-Unis, ainsi qu’à Télé-Québec au Canada et SBS en Australie. Son œuvre a été présentée dans des musées prestigieux et des galeries dans le monde entier, notamment le Musée de la Civilisation et le Musée national des beaux-arts du Québec à Québec; la National Gallery of Art à Washington, DC; le Museum of Modern Art et le Whitney Museum of American Art à New York.
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MARIE DAUVERNÉ

Née dans les alpes, je vis et travaille à Thiohtià:ka (Montréal) depuis 2003, entre le Lac-Saint-Jean et la Pays du Mont-Blanc. Mes vidéos sont sélectionnées dans des festivals internationaux et locaux (Rotterdam International Film Festival, New York MIXNY, Festival du Film court d’Angoulême, Fantasia, Québec Cinéma, FIFA, M.U.F.F., F.F.F, Queer City Cinema...). Depuis 2012, mes projets multidisciplinaires ont été exposés à Montréal, Toronto et Sarajevo. En parallèle de ces activités, j'enseigne les arts visuels au post-secondaire, j'anime des ateliers d'arts dans ma communauté et je prends soin de ma jeune famille.
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Jean Marc Larivière

Jean Marc Larivière est né le 31 janvier 1955, à Hawkesbury, Ontario. Après des études universitaires en mathématiques et en physique, il s’investit dans l’écriture, la musique, le théâtre et le cinéma, d’abord à Toronto pendant une trentaine d’années, puis à Ottawa, depuis 2006.

Cinéaste autodidacte, ses réalisations ont été présentées, entre autres, au Festival international de Toronto, au Festival des films du monde (Montréal), à la Cinémathèque Ontario, aux Rendez-vous du cinéma québécois, à la Cinémathèque française (Paris), et au American Film and Video Festival (New York). Quand il n’est pas derrière la caméra, il contribue aux projets d’autres artistes tels Peter Mettler, Barbara Sternberg, Marie Cadieux, Robert Dickson et Patrice Desbiens. Depuis 1979, Jean Marc Larivière dirige sa propre maison de production, les communications osmose. Il a trois enfants.
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Lise Beaudry

Lise Beaudry est originaire d’Earlton, un petit village près de la frontière du Québec et de l’Ontario.  En tant qu’artiste franco-ontarienne,  elle aborde la photographie comme une plateforme d’expérimentation. Beaudry est titulaire d’un baccalauréat de Concordia University (1997) et d’une maîtrise en arts visuels (2006) de York University.  Ses œuvres photographiques et vidéographiques ont été présentées dans des centres d’artistes à travers le Canada et à l’étranger: Les Rencontres Internationales de la Photographie, Arles (1997), Grunt Gallery, Vancouver (1999) A Space, Toronto (2000), Biennial of Young Artists, Romania (2004), Ice Follies, North Bay (2006), AXENÉO7, Gatineau (2010), Art Gallery of Hamilton (2011), Art Gallery of Mississauga (2012), Pierre François Ouellette Art Contemporain, Montréal (2017) et Koffler Gallery, Toronto (2018). Ses œuvres se retrouvent dans plusieurs collections privées incluant le Groupe bancaire TD. Elle vit et travaille à Toronto, où elle enseigne à l’Université de Toronto à Mississauga dans le programme d’art et d’histoire de l’art. 
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DANIEL COCKBURN

Daniel Cockburn joue à l'intersection du cinéma d'avant-garde et du cinéma narratif. En associant des stratégies narratives innovantes à des expérimentations structurelles, il ouvre la réalité quotidienne pour révéler les codes étranges qui la sous-tendent. Auto-réflexif jusqu'à la névrose, Cockburn est fasciné par la façon dont les images en mouvement peuvent éclairer les structures et les rythmes de nos vies ; il est toujours à la recherche d'un sens caché dans le hasard et de modèles dans le chaos.
DANIEL COCKBURN WIKI


JACQUELYN HÉBERT

Jacquelyn Hébert est une artiste multidisciplinaire qui s’intéresse aux récits historiques, culturels et imaginaires. Sa récente préoccupation artistique interroge la complexité des identités canadiennes et franco-canadiennes. Elle s’intéresse aux espaces entre nos attentes culturelles et la réalité de nos expériences vécues. Ses oeuvres ont déjà été présentés dans des expositions nationales et internaltionales. En 2014, Hébert a complétée une maîtrise en beaux-arts de l’Université Concordia à Montréal et elle vit et travail présentement à Toronto. 
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PROFIL VUCAVU


MARIA LEGAULT

Maria Legault est une artiste de la performance qui s’est cachée dans des sacs de papier, a marié une poupée et a réparé des trous avec du glaçage rose. Elle détient un Baccalauréat en beaux-arts de l’Université Concordia, un M.F.A. de l’Université de Guelph et un Doctorat en Études et pratiques des arts de l’UQAM. Pour sa recherche/création doctorale, elle a entrepris une étude auto-ethnographique de l’impact psychologique de son exil volontaire et social du Québec vers l’Ontario dans le but d’en tirer du matériel pour la création d’une performance autofictionnelle. Son travail a été largement exposé au Canada et à l’international. Elle est également récipiendaire de nombreux prix et bourses.
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NADINE VALCIN

Nadine Valcin une productrice, réalisatrice et scénarise primée. Elle réalise et produit des émissions, des magazines pour la télévision, des documentaires et des œuvres cinématographiques qui ont été diffusées à CBC, CBC News Network, TVO, W, Artv, Réseau de l’information (RDI), Société Radio-Canada (SRC), TFO, ainsi que TV One et le History Network aux États-Unis.

Parmi ses réalisations pour l’Office national du film du Canada, on retrouve les documentaires Black, Bold and Beautiful (1999), Une école sans frontières (2005) et À quand la justice (2006).  En 2016, son court métrage expérimental Heartbreak était un des 20 finalistes parmi plus de 1700 soumissions à l’édition inaugurale du TIFFxInstagram Shorts Fest du Festival international de films de Toronto. La cinéaste aborde aujourd'hui la fiction. Elle a réalisé trois courts métrages et développe présentement deux longs métrages de fiction ainsi que Les fantômes de la mémoire, une expérience de réalité virtuelle sur l’histoire oubliée de l’esclavage au Canada. 

Nadine est récipiendaire de nombreux prix et subventions incluant deux bourses Chalmers de recherche artistique et le Drama Prize du National Screen Institute pour le court métrage bilingue Entre deux / In Between (2009). Elle détient un diplôme professionnel en architecture de l’Université McGill et a participé aux ateliers Doc Lab, Women in the Director’s Chair et ceux du National Screen Institute. Elle était artiste-en-résidence à l’école de droit Osgoode de l’université York pour l’année académique 2015-2016 et la récipiendaire du DGC Ontario Mentorship 2016 - un programme de mentorat de Women in Film and Television (Toronto) et la Guilde des réalisateurs du Canada. 
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PROFIL SUR VUCAVU


À PROPOS DE LA COMMISSAIRE :


CAROLINA REIS

Carolina Reis est une artiste visuelle, designer et commissaire francophone basée à T’karonto. Elle est née au Portugal et vit depuis plus de 25 ans sur le territoire que nous appelons aujourd'hui le Canada. Son travail en commissariat est motivé par le désir de partager des histoires et de rendre visible des artistes sous-représenté.e.s dans la scène artistique, qu'iels soit émergent.e.s ou établi.e.s et de diffuser leurs œuvres afin de garder vivante la production artistique. Étant fortement engagée dans la communauté francophone en Ontario, il est important pour elle d'inclure des artistes qui sont marginalisé.e.s par leurs identités de genres, d’apparences, de langues ou d’habiletés.

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MENTIONS DE LA COMMISSAIRE


Un grand merci à Alissa Firth-Eagland pour sa générosité et son dévouement en tant que mentor en commissariat dans ce projet. Je tiens aussi à reconnaître Barbara Gilbert pour m'avoir soutenue et encouragée dans cette initiative. De plus, je voudrais également mentionner toutes les personnes qui ont accepté de relire mon texte initial et de me donner leurs commentaires en toute franchise dont Jacquelyn Hébert, Francis May, Anouk Desloges, Nadine Valcin, Paul Walty, Samuel Choisy, Lise Beaudry et Salomé Viguier. Enfin, j'aimerais remercier Miriam Ginestier, Dyana Ouvrard et Jocelyn Pogorbsky pour leur précieux retour dans cette nouvelle édition du texte.

Ainsi que: 

Denis Taman Bradette
Zoong Nguyen
Laura Demers
Claudia Bernal
Lou-Anne Bourdeau
Rémi Belliveau

Ce programme est co-présenté par Le Labo et VUCAVU.  

    

 de son soutien,Conseil des arts du CanadaLe Labo remercie le

ainsi que ses précieux partenaires: