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Dans son essai "À pied", le cinéaste Jean-Pierre Marchant discute comment « voyager à pied peut susciter des pensées et des émotions basées sur des souvenirs passés, et cela peut retenir notre attention avec des visuels apparemment aléatoires et non-médiatisés ». Dans « À pied », le programme qu'il a sélectionné pour la série #Géographies de VUCAVU, Marchant regarde comment ces cinq films utilisent la marche comme moyen d'interroger la mobilité à travers un espace et un lieu et explore comment l'acte de marcher se rapporte à notre humanité.
 

**VEUILLEZ NOTER : Ce programme est seulement gratuit pour l'usage privé d'un seul utilisateur. Les groupes ou institutions qui souhaitant diffuser ce programme auprès du public peuvent se renseigner sur les tarifs de location de groupes à l'adresse suivante admin@vucavu.com

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Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. L’an dernier, le Conseil a investi 153 millions de dollars pour mettre de l’art dans la vie des Canadiennes et des Canadiens de tout le pays.

Nous tenons à remercier le Conseil des arts de l’Ontario, un organisme du gouvernement de l’Ontario, de son aide financière.

 

Jean-Pierre Marchant
Réalisateur
 

"À pied"
Essai de: Jean-Pierre Marchant

Établi à Lethbridge, l’artiste latino-canadien Jean-Pierre (JP) Marchant est un cinéaste émergent. Il a commencé à tourner des films en 2013 après avoir travaillé pendant des années dans l’industrie pétrolière en Alberta. Un atelier cinématographique durant tout un été à le Film and Video Arts Society of Alberta (FAVA) a été son tremplin. En tant que cinéaste indépendant, Jean-Pierre souhaite de plus en plus combiner les pratiques cinématographiques analogiques et numériques.

Les œuvres précédentes de Jean-Pierre ont exploré des thèmes tels que le malaise moderne des cols blancs, les histoires locales, les paysages et les mythes. Il travaille actuellement sur une série de courts métrages à propos des rêves et des cauchemars banlieusards.

Jean-Pierre a siégé sur le conseil d’administration de l’Alberta Media Arts Alliance Society (AMAAS) et il est l’un des membres fondateurs de la récemment créée Lethbridge Independent Film Society (LIFS). Ses films ont été présentés par FAVA (Edmonton), le Festival international du film de Calgary, TUFF (Toronto), Anti-Matter (Victoria) et WNDX (Winnipeg), et il a récemment participé au programme Prairie Tales Redux 2017 (Canmore), entre autres.

À pied 
par : Jean-Pierre Marchant

« Les marcheurs sont des “pratiquants de la ville”, car la ville est faite pour qu’on y marche. Une ville est un langage, un entrepôt de possibilités, et marcher est l’action de parler ce langage ou de piger parmi ces possibilités. Tout comme le langage limite ce qui peut être dit, l’architecture limite où l’on peut marcher, mais le marcheur invente d’autres façons de s’y rendre. »

Traduction libre de Rebecca Solnit, "Wanderlust: A History of Walking", 2001

Le livre « Wanderlust: A History of Walking » (2001) de l’essayiste américaine Rebecca Solnit n’est pas tant une histoire de la promenade qu’une exploration de la relation entre la pensée, la marche et la culture. Le terme « wanderlust » provient des mots allemands wandern (faire une randonnée) et lust (désir); wanderlust, par conséquent, signifie littéralement « un désir de faire une randonnée ». Marcher est une partie cruciale de l’expérience humaine. Que l’on marche sur une route souvent foulée ou sur une autre qui nous est nouvelle, la promenade façonne ce qu’on voit du monde et la façon dont on le voit. Voyager à pied peut inspirer des pensées et des émotions basées sur des souvenirs passés, et peut arrêter notre attention sur des images apparemment aléatoires et sans intermédiaire. Les films que j’ai sélectionnés pour « À pied » utilise la marche comme un moyen de poser des questions sur la mobilité à travers l’espace et les endroits, les géographies émotionnelles de l’attachement et de la perte, et le mouvement entre la vie et la mort. 

Marcher est une partie cruciale de l’expérience humaine. Que l’on marche sur une route souvent foulée ou sur une autre qui nous est nouvelle, la promenade façonne ce qu’on voit du monde et la façon dont on le voit.

« spectroscopy » (2011) de Leslie Supnet a été tourné sur pellicule Super8 pour l’événement WNDX Festival One Take Super 8. Les rues de Winnipeg fournissent le langage du film, et les éléments formels de la couleur, de la forme et du montage caractérisent comment Supnet s’exprime à propos de cet endroit. Supnet a créé le film à travers une série de plans d’objets apparemment aléatoires qu’elle a vus lors de ses déambulations le long d’une rue achalandée de Winnipeg. Toutefois, Supnet maintient un ferme contrôle sur ce que l’on voit et comment on le voit. Plutôt que de nous donner une vision large de la rue et laisser nos yeux errer vers différents objets dans le cadre, elle dirige notre regard vers des objets précis, choisis pour leurs qualités formelles. Cette technique oblige le spectateur à voir les rues de Winnipeg de façon très délibérée et stylisée. « spectroscopy » soulève la question à savoir si les piétons voient ce qui les entoure de façon similaire — lors d’une promenade, se concentre-t-on et se rappelle-t-on seulement de certains objets et certaines personnes parmi une avalanche de stimulations? Finalement, il ne nous reste que des éclats de couleurs comme éléments formels distillés des objets eux-mêmes. « spectroscopy »​ porte l’attention du spectateur jusqu’à la gamme variée de couleurs et de formes qui nous entourent alors que nous bougeons à travers des espaces, si seulement nous nous arrêtons pour regarder. 

Finalement, il ne nous reste que des éclats de couleurs comme éléments formels distillés des objets eux-mêmes.

« DER SPARZIERGANG (The Walk) » (2013) de Margaret Rorison utilise l’idée de marcher de façon similaire, mais avec encore moins d’intermédiaires, dans ce cas-ci pour parler de Berlin. Le titre du film de Rorison est une référence à la nouvelle « The Walk » (La Promenade, 1917) de l’écrivain suisse Robert Walser, où le narrateur, un poète, s’enfuie de sa pièce d’écriture, « ou une chambre de fantôme », et se promène à pied à travers sa ville. Comme Walser l’a fait près de 100 ans plus tôt, Rorison erre à travers les rues de Berlin apparemment sans raison ou but. Son film, comme l’histoire de Walser, est une exploration des rencontres fortuites qui peuvent se produire dans les espaces publics seulement lorsqu’on est à pied. Bien que « DER SPARZIERGANG (The Walk) »  utilise un langage cinématographique semblable à « spectroscopy » de Leslie Supnet, Rorison donne à nos yeux plus de liberté de se déplacer à travers le cadre. De plus, Rorison semble plus concentrée sur la promenade elle-même et les endroits qu’elle rencontre que sur les objets. Le montage (entièrement fait en caméra) est très rapide et nous force à regarder le film soigneusement pour saisir toutes les choses qui nous sont présentées. Finalement, le montage rapide nous offre bien peu de temps d’analyser consciemment ce que nous voyons, ce qui rend difficile la tâche de décrire avec certitude ce que nous avons vu à l’écran. Voilà l’attrait du film : la capacité de laisser les spectateurs avec une impression d’un endroit, plutôt que des pensées complètement formées ou des descriptions concrètes à son propos.

... le montage rapide nous offre bien peu de temps d’analyser consciemment ce que nous voyons, ce qui rend difficile la tâche de décrire avec certitude ce que nous avons vu à l’écran.
Still image from "1000 Feet", Gerda Cammear, 2000, CFMDC

Image fixe de « 1000 Feet », Gerda Cammaer, 2000, CFMDC

« 1000 Feet » (2000) de Gerda Cammaer est un essai visuel poétique sur la ville de Maputo, au Mozambique. Les visions, sons et rythmes de la ville de Maputo composent les éléments principaux du film, tandis que Cammaer se concentre sur les gens de Maputo plutôt que sur les objets ou l’architecture de ces rues. Contrairement aux deux films précédents, où l’accent n’est pas mis sur les gens, Cammaer s’intéresse aux réactions que les autres ont face à sa caméra. Conséquemment, elle montre souvent des personnes qui sont devenues conscientes d’elle et de son équipement photographique. Plusieurs de ses sujets sont de pauvres commerçants de rue vendant leurs produits, ce qui fait ressortir les thèmes d’humanité et de pauvreté du film, tandis que des plans des noms de révolutionnaires socialistes historiques sur les panneaux des rues indiquent la conscience politique de la réalisatrice. La trame sonore du film s’apparente beaucoup à l’aspect aléatoire des gens que Cammaer croise, avec des boucles de radio se faisant apparemment entendre au hasard et des bruits ambiants de Maputo qui contribuent à créer un sentiment général de rencontres inattendues au sein de l’œuvre.

... Cammaer s’intéresse aux réactions que les autres ont face à sa caméra. Conséquemment, elle montre souvent des personnes qui sont devenues conscientes d’elle et de son équipement photographique.
Still image from "Geriatrica", Peter Dudar, 2014, CFMDC

Image fixe de « Geriatrica », Peter Dudar, 2014, CFMDC

« Geriatrica » (2014) de Peter Dudar est à propos de la marche à un niveau très différent et pour des raisons très différentes. Si une ville est un langage, et y marcher est l’action de parler ce langage, « Geriatrica »​ présente une femme âgée, Maria, au crépuscule de sa vie et ayant de la difficulté à se déplacer et à s’exprimer de façon cohérente. Dudar a fixé une caméra sur la marchette de sa mère de 90 ans et a enregistré ses marches à travers les couloirs de sa maison de retraite. À cause du placement de la caméra, nous nous retrouvons littéralement dans les souliers d’une personne dont la vie spatiale a été réduite et dont les capacités physiques et cognitives sont en déclin à cause de la vieillesse. Les pertes de mémoire de Maria front qu’il ne semble y a voir rien d’autre à propos de son existence — rien avant ou après les couloirs. La trame sonore est composée des sons de l’établissement où habite Maria et de conversations entre elle et le réalisateur, qui marche tout près et qui tente de la rassurer que tout va bien aller pour elle. Leur conversation est parfois déchirante, car Maria souffre de démence et oublie souvent où elle est. Le film est lent et mesuré, ce qui nous force à nous baisser et à voir les choses du point de vue diminué de Maria. 

... nous nous retrouvons littéralement dans les souliers d’une personne dont la vie spatiale a été réduite et dont les capacités physiques et cognitives sont en déclin à cause de la vieillesse.

Image fixe de « Spanky: To The Pier and Back », Guy Maddin, 2008, Winnipeg Film Group

Dans « Spanky: To the Pier and Back  » (2008) de Guy Maddin, l’accent est sur une marche du réalisateur avec son ami à quatre pattes. Tourné dans le village de Gimli, au Manitoba, le film se concentre sur une marche que Maddin et son carlin adoré ont probablement faite de nombreuses fois auparavant. Lorsque Maddin nous montre Spanky courant ici et là, entrecoupé de plans du va-et-vient des vagues sur la plage du lac Winnipeg, il semble attribuer des qualités d’effervescence, de dynamisme et de vitalité à son carlin adoré. La musique est lente et méditative, mais une occasionnelle variation en mode mineur suggère que tout n’est pas ensoleillé lors de cette marche. Vers la fin du film, la musique commence à sonner comme un hymne funèbre, et nous entendons le bruit des vagues sur la plage du lac Winnipeg alors que la musique atteint un genre de crescendo. Finalement, on nous présente une série rapide de plans noirs pendant plusieurs secondes à la fois, ce qui nous indique pourquoi Maddin a fait ce film. Deux thèmes sont abordés : la relation entre un humain et un chien, et l’ancrage de cette relation à une géographie précise, qui est investie de la perte. 
 



Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. L’an dernier, le Conseil a investi 153 millions de dollars pour mettre de l’art dans la vie des Canadiennes et des Canadiens de tout le pays.


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Tourné dans le village de Gimli, au Manitoba, le film se concentre sur une marche que Maddin et son carlin adoré ont probablement faite de nombreuses fois auparavant.